Haraway, de son côté, a inventé le Chthulucène, qui est un anti-Anthropocène vraiment enchanté, enchanteur, comme Donna elle- même.
De toutes parts, on se met à parler des liens. On réalise qu'on est relié à toutes sortes de choses et à toutes sortes de gens. Ce sont des liens qui peuvent être d'amour.
Mais qui a connu l'amour sait de source sûre que plus on aime, plus on souffre.
L'amour condamne au plaisir et à la souffrance.
Si l'on se met à aimer les plantes, les arbres, les étoiles, les bactéries, alors vivre deviendra impossible.
Je veux dire: vivre comme un humain deviendra impossible.
Car nous serons ravagé.e.s par la violence qui frappe les créatures que l'on aime.
Plus on crée des liens avec le non-humain, plus on augmente notre souffrance.
Mais je crois que précisément, cette souffrance est la seule solution.
Nos larmes sont une bénédiction. Souffrir n'est pas un problème. Le seul problème, c'est le capitalisme. Ou mieux encore: c'est l'humain en tant que Sujet du capitalisme. L'humain fait mal.
C'est un constat purement technique.
Techniquement, l'humain fait mal.
Je suis humain: je fais mal, je vais mal, je suis mal. Mais ce point est précisément notre planche de salut.
L'humain va tellement mal qu'il est en train de se transformer.
C'est un savoir de ce genre que nous délivre l'expression fondre en larmes.
La créature qui pleure ressemble à du beurre fondu ou à un golem d'argile.
Tendre et molle, quasiment liquide, elle est dans les meil-leures conditions qui soient pour se transformer.
BDSM Apocalypse par Romain Noël, dans Klima Speculations et extinction, au sujet de Making Kin in the Chthulucène de Donna Haraway.
Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités.
Réplique de Ben Parker
Spiderman 2002